« Au fond, le mot « abstrait » désigne pour moi quelque chose de dénaturé, de faussé, d’inachevé, de raté. Dans la peinture abstraite habituelle, l’artiste essaie de peindre quelque chose de figuratif et n’y arrive pas. » À les prendre au pied de la lettre, ces affirmations d’Albert Oehlen en 2011 ne distingueraient la peinture figurative de la peinture abstraite que par le ratage, la dénaturation ou par la torsion, volontaire ou non, de la figure. Mais, plus qu’une impossibilité figurative, c’est une stratégie de brouillage de tous les codes picturaux qui met la peinture en suspension et qui donne à voir une peinture en train de se faire. Albert Oehlen invente ainsi le brouillon en peinture ou le surgissement d’un autoportrait de la peinture, rendu possible par l’absence d’intention du peintre.