Paymages. Images de paysage

Colloque Art et Géographie. 12 - 13 septembre 2024

Dans le cadre des changements globaux auxquels le paysage naturel et anthropisé est de plus en plus confronté dans les dernières décennies, les disciplines artistique et géographique ont ressenti le besoin de porter l’attention à la diversification des regards que cela a entraînée. Entre le regard distant et recomposé du paysage réel des peintres, celui documentaire des photographes, celui esthétisant des cinéastes, et enfin celui analytique des géographes se jouent différentes approches du paysage, tout à la fois dissonantes et complémentaires, qui bouleversent l’appréhension contemporaine du paysage et peut-être même sa définition.

L’analyse de ces regards à travers les images, du regard individuel des créateurs aux regards collectifs des chercheurs-géographes, devrait permettre d’envisager le changement culturel de notre rapport au paysage. Comment saisit-on le paysage ? Comment le parcourt-on ? Quelle est la nécessité du paysage dans notre rapport au monde ? 

Questionner les images de paysages confrontés aux changements globaux, c’est s’interroger sur les points de vue adoptés, les déplacements qu’elles révèlent et les représentations sociales qu’elles induisent. Mais c’est également mettre en évidence la concurrence entre des images qui convoquent les catastrophes, d’autres qui suggèrent l’impossibilité de représenter le paysage et celles, au contraire, qui augmentent par des dispositifs polysensoriels l’expérience paysagère.

L’objectif de cette comparaison d’images est double : questionner ce que les images font du paysage et comprendre si ces images témoignent d’une écologisation de l’observation ou plutôt d’une ouverture sur l’imaginaire à travers différents regards. 

Colloque 12 - 13 septembre 2024

Direction : Lydie Goeldner-Gianella, professeure en géographie, Université Paris 1 et Sandrine Morsillo, professeure en arts plastiques, Université Paris 1

Université Paris 1-Panthéon Sorbonne
Institut de Géographie
191, rue Saint-Jacques
75005 PARIS

Programme :

Paymages. Images de paysage

Jeudi 12 septembre 2024
Petit Amphi

9h30 - Accueil

10h - Introduction  : Lydie Goeldner-Gianella, professeure en géographie, Laboratoire de Géographie Physique, Université Paris 1 et Sandrine Morsillo, professeure en arts plastiques, Institut ACTE, Université Paris 1.

10h30 – 12h : Paysages représentés et représentations sociales

Antonella Tufano, professeure en arts et sciences de l’art, Institut ACTE, Université Paris 1.
Au-delà du sublime. Le dépassement esthétique dans la représentation du risque.

Au XVIIIe siècle, les représentations artistiques des catastrophes ont donné lieu à un imaginaire spécifique, un genre pictural inédit, celui du sublime. La prolifération et l’appropriation de ces images dans la société a mis en évidence un goût pour cette « passion dangereuse ». À travers des représentations ultra-contemporaines, il est possible d’esquisser les contours de cette nouvelle catégorie d’images ainsi que la mutation ou la résistance de certains caractères esthétiques du sublime au XXIe siècle.

Lydie Goeldner-Gianella, professeure en géographie, LGP, Université Paris 1.
Les zones humides littorales dans la peinture et la société françaises du XVIIIe siècle au XXIe siècle

Les représentations sociales du littoral ont évolué entre autres sous l’influence de la peinture, à partir des XVIIIe et XIXe siècles, mais cette influence n’a pas atteint les zones humides littorales, restées ignorées des peintres français jusqu’au début du XXe siècle. L’image et le statut des zones humides littorales ont toutefois récemment évolué, dans la peinture comme dans les représentations sociales et le contexte social - signe d’une influence réciproque, mais évolutive, entre ces trois éléments.

Élisabeth Amblard, maître de conférences en arts plastiques, Institut ACTE, Université Paris 1.
De la terre à la ligne d’horizon : conceptions de l’espace - naturel - dans quelques pratiques artistiques contemporaines

Choisir pour entrer dans une réflexion sur le paysage aujourd’hui, deux éléments de natures distinctes : la terre (matérielle) et l’horizon (imaginaire) comme deux pôles possibles. Pour cela analyser notamment, la vidéo « Fade » (2013) de Jean-Claude Ruggirello et l’œuvre de Kôichi Kurita, la « bibliothèque de terres » (débutée en 1990), considérant les propriétés imageantes de l’un et de l’autre et en prenant pour appuis et repères une part des travaux de Michel Collot sur la structure d’horizon.

Delphine Grancher, ingénieure de recherche, CNRS.
Dessiner le paysage pour raconter les changements environnementaux et sociétaux, par des collégiens en Polynésie française  

La perception de l’environnement des collégiens des atolls de Polynésie Française se construit à partir de la transmission familiale de la culture traditionnelle, des programmes scolaires nationaux et des média. Qu’envisagent-ils alors comme changements environnementaux pour le futur ? Nous avons choisi de les faire dessiner un paysage actuel de leur atoll et puis le même paysage tel qu’il pourrait être devenu dans 2 générations. Nous présenterons les résultats de l’analyse de ces dessins.

14h-15h30 : Points de vue sur le paysage

Ramos Aurélien, maître de conférences en géographie, CRIA, Université Paris 1.
Voir le paysage derrière la « mauvaise herbe » : transformation des perceptions du paysage urbain à l’heure de la transition socio-écologique

Face aux changements globaux, les mesures d’adaptation des villes par leur renaturation restent souvent des réponses microlocales. Pour autant, ces dispositifs modifient le paysage urbain. En invitant à reconsidérer nos formes de cohabitation avec le vivant, ils bousculent notre cadre de vie quotidien. Cette communication qui s’appuie sur un corpus photographique produit et diffusé via les réseaux sociaux et l’application de signalement DansMaRue interroge comment la place faite au végétal et à l’animal contribue à faire évoluer les perceptions citadines des paysages urbains ordinaires.

Salomé-Charlotte Camors, doctorante en arts plastiques, Institut ACTE – École doctorale APESA, Université Paris 1.
Capturer les cours d’eau, s’effacer aux profits d’autres points de vue

En Ariège, comme dans de nombreuses régions, les enjeux liés à la préservation des cours d’eau sont d’une importance capitale. Pourtant, les difficultés rencontrées par les associations militant pour la protection de ces milieux témoignent d’un manque de considération. En tant que créateur.rices d’images, nous contribuons à façonner le regard porté sur les cours d’eau et à travers 2 projets artistiques nous verrons comment l’effacement de l’artiste peut rendre honneur à la complexité et la richesse des cours d’eau.

Edwige Motte, docteure en géographie.
Art et Géographie, regard croisé sur le littoral

Les représentations picturales pourraient-elles élargir nos connaissances au sujet des évolutions environnementales ? A l’interface entre "art" et "territoire", nous présentons les résultats d’une méthodologie novatrice d’observation des changements côtiers. il s’agit d’un regard croisé sur les paysages, qui permet d’envisager de nouvelles fertilisations entre patrimoine artistique et patrimoine environnemental. cette approche se trouve ici dynamisée par les enjeux scientifiques et culturels tant de compréhension historique que de sauvegarde et de protection.

Nicolas Floc’h, artiste.
De Initium Maris, l’émergence du paysage, à La couleur de l’eau, le paysage de la couleur

Initium Maris fait partie de la série photographique Paysages Productifs, typologies des paysages des côtes françaises entamés en 2015 avec l’objectif de faire émerger la représentation d’un territoire invisible, les paysages qui s’étendent sous la surface de l’océan, et d’en conserver une mémoire. La série La couleur de l’eau documente les variations de la couleur dans des environnements diversifiés. Ces paysages, les plus communs dans l’océan ou les eaux intérieures, sont une étendue colorée qui raconte le passé, le présent et le futur des territoires.

16h-17h30 : Déplacements dans le paysage

Céline Clauzel, professeure en géographie, LADYSS, Université Paris 1, Pierre Sachot, doctorant en géographie, Tess Heydorff-Decaux, doctorante en géographie, Sarah Bortolamiol, chargée de recherche, LADYSS, CNRS, Mathilde Riboulot-Chetrit, maître de conférences en géographie, LADYSS, Université Paris 1.
Capter et cartographier le paysage animal par les images

Cette communication examine la manière dont les géographes utilisent les images pour rendre compte de la présence de la faune sauvage dans nos paysages anthropisés. Elle explore le contraste entre une approche ex situ à partir d’images satellites et photographies aériennes pour cartographier les continuités écologiques et une approche in situ basée sur des photos et des vidéos provenant de pièges caméra.

Romain Courault, maître de conférences en géographie, LADYSS, Université Paris 1
Colorer, numériser : l’apport des compositions colorées et de l’imagerie satellitaire multi-spectrale dans la caractérisation d’états de surface terrestre

Pour caractériser les surfaces (nuages, eau, végétation, glace, sols) via les images satellites, la réalisation de compositions colorées est nécessaire. Celles-ci assemblent diverses portions de la lumière, visible (ou non) pour l’œil humain. Pour les dynamiques des paysages, ces compositions colorées sont multiples, dépendantes des surfaces. Des compositions colorées « artistiques » seront présentées, l’intensité de la réflexion des surfaces soulignée. Les indices dérivés (pour le végétal, les sols, l’eau) seront présentés, discutant de leurs potentiels et de leurs limites.

Sandrine Morsillo, professeure en arts plastiques, Institut ACTE, Université Paris 1
Points de vue : images du paysage aux risques du réel

De l’image adoptant un traditionnel point de vue horizontal qui convoque un regard contemplatif, nous examinerons d’autres points de vue pour analyser le paysage. Depuis la peinture de Paul Rebeyrolle qui annonce avant l’heure des points de vue satellitaires en passant par l’expérience du paysage vertical de Begüm Erciyas et Daniel Kötter jusqu’au diorama à grande échelle du duo He He, Helen Evans et Heiko Hansen où le spectateur, immergé, sollicite d’autres sens. 

Vendredi 13 septembre

Nouvel Amphi

10h-12h : Paysages empêchés, paysages disparus, paysages résilients

Marwan Moujaes, maître de conférences en arts visuels, L’ACCRA, Université de Strasbourg
« Humilier c’est priver de paysage »

Nous penserons le paysage comme une action fondamentalement politique. Le paysage sera ici compris au-delà d’une définition purement perceptive pour l’imaginer comme un lieu par et dans lequel se dessine l’architecture même de l’édifice politique. L’humiliation, comme forme de violence affective, sera ici pensée comme le lieu dans lequel se négocie la possibilité même d’un paysage. Humilier c’est exclure du projet politique le paysage.

Danièle Méaux, professeure émérite en esthétique et sciences de l’art, Université Jean Monnet, Saint Étienne.
Quand le paysage vient à manquer

Le paysage n’est pas un simple spectacle offert au regard et appréciable à l’aune d’une culture visuelle. Certains artistes photographes documentent l’après-incendie à Paradise (Californie) ou en Gironde (France) : par-delà le visible, leurs travaux révèlent ‒ au travers de minutieuses enquêtes ‒ la véritable amputation que représente pour les habitants de ces régions la destruction du milieu qui les environnait ; ils conduisent ainsi, par la négative pourrait-on dire, à une réflexion sur la notion même et l’importance du paysage.

Franck Lavigne, professeur en géographie, LGP, Université Paris 1
La photographie comme outil d’analyse de l’évolution des paysages et de la résilience post-catastrophe

Fin 2024 sera commémoré le vingtième anniversaire du tsunami dévastateur du 26 décembre 2004, qui fit plus de 160 000 victimes dans la province d’Aceh en Indonésie. Lors de ses six missions de terrain réalisées lors des deux années post-catastrophe dans le cadre du programme Tsunarisque, F. Lavigne et son équipe ont constitué une base de données photographiques de plusieurs milliers de clichés. En 2017, il retourne sur place dans le cadre d’un nouveau projet intitulé « Banda Aceh 13 ans après : résilience et adaptation post-tsunami », qui avait pour but d’analyser l’évolution des paysages de ce territoire par le biais de l’image...

Marion Laval-Jeantet, professeure en arts plastiques, Institut ACTE, Université Paris 1
Solastalgia, la névrose des paysages disparaissant et la nécessaire redéfinition de l’œuvre environnementale

L’effondrement de la biodiversité, le réchauffement climatique et l’artificialisation des sols engendrent aujourd’hui des concepts troublants pour la sensibilité artistique : la solastalgia, névrose des paysages disparaissant, et l’amnésie du paysage. Que devient le statut de l’art environnemental dans cette vision d’un retour impossible à ce que nous connaissions ? Celui de la conservation d’un souvenir paysager pour les générations futures qui ne pourront le voir ? Une nostalgie face à ce que Barbara Cassin définirait comme un intraduisible : les conséquences d’une dégradation insouciante de notre oikos ?

Antoine Perrot, artiste, chercheur associé Institut ACTE, Université Paris 1
Le paysage empêché

Le dépeuplement du paysage dans la peinture contemporaine marque une rupture dans la tradition classique du paysage. Tout un appareil, qu’il soit d’ordre plastique (cadrage, frontalité, verticalité…), ou d’ordre de la représentation (traces d’activités humaines, architectures…) construit des espaces oblitérés, des paysages empêchés qui repoussent le spectateur. Entre perte de notre proximité avec la nature et impossibilité de restituer un environnement qui nous échappe, le paysage contemporain nous tend l’image de la séparation.

14h- 15h30 : Paysages augmentés, perceptions multisensorielles

Agnès Foiret-Collet, maître de conférences en arts plastiques, Institut ACTE, Paris 1
Points de vue, points de vie

Nous nous intéresserons aux pratiques qui ont renouvelé la pensée critique du paysage, aux créations collectives de terrain qui privilégient les recherches interdisciplinaires, l’art du contact et de l’échange pour habiter le paysage plutôt que de le représenter. Nous aborderons les corps-paysages de Vaughn Bell ainsi que le perspectivisme animalier d’Alan Sonfist qui incluent un souci du vivant à l’heure des changements globaux.

Alessandro Cariello, doctorant en cinéma, Institut ACTE, école doctorale APESA, Université Paris 1
Percevoir et penser le paysage dans les images et sons du cinéma méridien contemporain

Les cinéastes Salvatore Mereu et Michelangelo Frammartino interrogent les formes culturelles de l’habiter des communautés rurales dans l’Italie méridionale à travers l’expérience du paysage. La perspective « méridienne » qu’ils adoptent en ce sens les conduit à construire un dispositif perceptif polysensoriel. Nous analyserons alors les modalités esthétiques de ces expériences paysagères qui problématisent la notion même de paysage, en soulevant la pluralité de rapports et d’interactions possibles ou nécessaires avec celui-ci.

Marie Chenet, maître de conférences en géographie, LGP, Université Paris 1
L’écriture cinématographique ou la possibilité d’un « paysage augmenté »

Devant un paysage, un observateur mobilise sa vision, son écoute, son odorat ou sa mémoire pour s’en forger un ressenti. Si la caméra ne peut a priori offrir qu’une appréhension réductrice des paysages, l’agencement des images et des sons permet de proposer un nouveau sens à l’expérience paysagère en intégrant le mouvement, la symbolique et la communauté de regards. Je montrerai comment j’ai mobilisé ces trois dimensions du cinéma au service de la géographie afin de contribuer à une expérience de paysage augmenté.

Contact :

Lydie Goeldner-Gianella : Lydie.Goeldner-Gianella [AT]univ-paris1.fr

Sandrine Morsillo : Sandrine.Morsillo [AT] univ-paris1.fr

Mots-clés

Géographie Paysage

Pour citer cet article

« Paymages. Images de paysage Colloque Art et Géographie. 12 - 13 septembre 2024 ». Pratiques picturales, 26 juin 2024.

https://pratiques-picturales.net/article80.html