Les œuvres de Vera Molnár répondent à des programmes déterminés à l’avance, souvent des algorithmes livrés à un ordinateur. Dans leur déroulement temporel, les suites générées par ces programmes se déploient en micro-récits abstraits de lignes, de surfaces ou de figures géométriques. Dans un deuxième temps de lecture, l’œil s’étonne de repérer une constante dans l’évidence mouvante des métamorphoses successives.
La traduction visuelle du déploiement mental de leur fabrication, l’émergence de micro-événements qui rompent avec une continuité ou un ordre instaurés à l’avance créent des strates temporelles dont le dépôt encré ou peint invite à décrypter les logiques. Les « stratégies créatives » de Vera Molnár semblent s’effarer de leur rigueur et se bousculent d’accidents, de désordres, eux aussi conçus à l’avance. Elles se soutiennent ou s’entourent de souvenirs personnels, de mythes individuels, que ses commentateurs mettent en avant et qui ajoutent leur saveur à l’appréciation des œuvres. Au sein des grands courants héritiers de l’abstraction géométrique, Vera Molnár engage une forme de narration qui se soutient d’un moteur logique et ludique.
Il s’agira ici de restituer au regard sur les œuvres de Vera Molnár l’épaisseur temporelle qui les anime, stratifiée en régimes différents qui s’entremêlent : mathématique mais aussi subjectif et historico-idéologique.